vendredi 26 juillet 2019

LÉGITIMITÉ ET PARTAGE du gâteau

(Édition 27.07.19)

ACTUALITÉ

L'OBSERVATEUR PAALGA  
Ouagadougou www.lobservateur.bf

Plus de six mois après l’élection du nouveau président de la République démocratique du Congo (RDC), le pays est toujours sans gouvernement et dans l’impasse. Les dissensions entre Félix Tshisekedi et son prédécesseur, Joseph Kabila, ont tourné au conflit ouvert pour se partager le gâteau. 

Ce qui se passe en République démocratique du Congo (RDC) semble s’inspirer du scénario d’un film western où invariablement, après le hold-up, les bandits, qui veulent se rouler mutuellement dans la farine, en viennent à s’étriper jusqu’à ce que le plus fort ou le plus roublard rafle la mise. 
Là également, il s’agit d’un hold-up, électoral cette fois-ci ou, si vous voulez, d’un “compromis à l’africaine”, comme l’avait si justement dit Jean-Yves Le Drian, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, au sujet de la présidentielle congolaise du 30 décembre 2018. 

HISTORIQUE 1 : après la 1ère guerre mondiale

Les vainqueurs — la France, les États-Unis et l’Empire britannique en tête — sont seuls à la barre, imposant leurs volontés aux vaincus, et surtout à l’Allemagne. Même si le président américain de l’époque, Woodrow Wilson, souhaite construire la paix sur le libéralisme économique et une « Société des Nations » censée prévenir de futurs conflits armés, le président français Georges Clemenceau plaide pour une certaine forme de vengeance. Il faut dire que son pays, mais aussi une bonne partie de la jeunesse française, a été ravagé par la guerre. Et c’est à l’Allemagne de payer, croit-il.

Au bout du compte, les conditions imposées par les vainqueurs dans le cadre du Traité de Versailles sont extrêmement sévères. L’Allemagne doit ainsi verser des sommes astronomiques en guise de réparations de guerre, son armée est grandement affaiblie, son territoire, réduit, est scindé en deux et le pays doit renoncer à son empire colonial.

Woodrow Wilson, dont le pays ne ratifiera finalement pas le Traité de Versailles, verra d’ailleurs dans ces conditions de paix les prémisses d’une éventuelle vengeance allemande. « Nous nous rendons coupables d’injustice », dit-il à l’époque.

HISTORIQUE 2 : la guerre de 100 ans
Le Figaro.fr 17.07.18

L'origine du conflit qui oppose pendant des décennies la France et l'Angleterre est d'ordre dynastique mais il est déclenché par la confiscation de la Guyenne. Depuis le mariage d'Aliénor d'Aquitaine en 1152 avec Henri II Plantagenêt les rois d'Angleterre sont devenus en même temps ducs d'Aquitaine et de Guyenne.

Mais le roi de France Philippe Auguste parvient à reconquérir une grande partie de leurs possessions. Aussi pour établir une paix durable, Saint Louis, par le traité de Paris de 1259, cède quelques territoires à Henri III d'Angleterre et la Guyenne est considérée à nouveau comme un fief, pour lequel le roi anglais doit prêter hommage au roi de France. 

En 1336 le roi d'Angleterre Édouard III Plantagenêt se met en rébellion et commence à guerroyer contre le roi de France Philippe VI. Ce dernier décide en mai 1337 de confisquer la possession de son vassal.

En réaction Édouard III conteste le titre de roi de France à Philippe VI: le 7 octobre il revendique publiquement à Westminster la couronne de France. Et renie l'hommage qu'il avait prêté pour la Guyenne en 1329. Selon la coutume, quelques mois plus tard, il fait porter son défi à Paris par l'évêque de Lincoln: le roi français est sommé de renoncer au royaume de France dont il a indument hérité. Or cette revendication du souverain anglais n'est pas infondée. En effet à la mort du roi de France Charles IV le Bel -troisième et dernier fils de Philippe le Bel- en 1328 c'est Philippe de Valois qui lui succède, or il n'est que le neveu de Philippe le Bel. Tandis que son cousin Édouard III est son petit-fils. Mais la prétention du souverain anglais est davantage tactique: elle a pour but de défendre son duché en terres françaises. 

HISTORIQUE 3 : Charlemagne

Inventeur de l'école, fondateur de l'Europe, premier grand roi de France, nombreux ont été les détournements faits autour du personnage de Charlemagne. Ce souverain franc reste, 1 200 ans après sa mort, la figure du Moyen Âge la plus célèbre. Et pour cause, du haut de son mètre quatre-vingt-dix, Charlemagne a dominé une grande partie de l'Europe pendant les 45 ans de son règne. Ce n'est pas sa voix fluette, son léger embonpoint ou encore son nez allongé qui ont traversé les siècles, mais bien son aura sur les peuples qu'il domine, ses conquêtes militaires ou encore les changements sociaux et culturels qu'il a tenté d'apporter. 

Il faut remonter à l'an 1000 pour trouver les premières traces de cet héritage. Le souverain du Saint-Empire romain germanique, Otton III, est le premier à utiliser la figure de Charlemagne. Il n'hésite pas à ouvrir le tombeau de son illustre ancêtre à Aix-la-Chapelle, capitale de l'empire carolingien, pour s'emparer de ses parures et de ses vêtements. Les ongles, les dents, les vêtements deviennent des reliques sacrées qui servent à l'héritage de ce dernier. Otton III n'est que le premier d'une grande lignée de rois, empereurs ou encore hommes politiques qui tentent de trouver en Charlemagne la légitimité qui leur fait défaut.

Tout au long du Moyen Âge, les rois de France se font les descendants de Charlemagne en faisant de lui le premier souverain de leur territoire et en s'appuyant sur le titre de roi des Francs dont dispose l'empereur avant son sacre, le 25 décembre 800. Ces rois entrent en opposition avec les empereurs germaniques, qui s'approprient également ce personnage tant convoité dont les origines germaniques sont incontestables.

De nombreux siècles plus tard, mais s'inscrivant toujours dans cette lignée, Napoléon ne tarde pas à utiliser l'argument carolingien pour légitimer ses conquêtes militaires. Il va même plus loin puisque le 6 septembre 1806, il annonce clairement "Je suis Charlemagne, parce que, comme Charlemagne, je réunis la couronne de France à celle des Lombards." Charlemagne devient un objet de propagande important pour l'empereur français, qui n'hésite pas à utiliser à outrance le parallèle entre eux deux. 

C'est ensuite au tour du IIIe Reich de se servir de Charlemagne à son avantage. Les nazis et le régime de Vichy (1940-1944) font de l'occupation allemande une logique de formation d'un unique État qui leur vient du glorieux empereur du IXe siècle. Les commémorations du 1200e anniversaire de sa naissance ont d'ailleurs été l'occasion pour les occupants, comme pour la collaboration, de réaffirmer que leur action s'inscrit dans celle de Charlemagne. 1945 signe la fin de l'Allemagne nazie.

Est-ce aussi celle de l'utilisation de l'image de Charlemagne bousculée par le dernier détournement en date ? Eh bien non, les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale en décident autrement. La construction européenne se fait avec Charlemagne en tête. Son nom est utilisé pour des médailles, des titres européens. Plus d'un millénaire après sa mort, Charlemagne est vu comme l'un des pères fondateurs de l'Europe et un des héritages sur lequel s'appuyer pour continuer la construction de cette Union européenne. 

A VOUS DE JOUER 

jeudi 18 juillet 2019

SUR LE SENTIER de la guerre..ou de la paix


(Édition 20.07.19)

ACTUALITÉ

Les tensions sont à leur comble entre le maire d’Oka et le grand chef de Kanesatake. Dans un geste sans précédent, les deux hommes politiques ont rencontré tour à tour mercredi les citoyens de la municipalité, inquiets de voir se profiler une nouvelle crise d’Oka.

L’église d’Oka n’était pas assez grande mercredi soir pour contenir les plus de 500 Okois conviés par le maire Pascal Quevillon à une séance d’information; quelques Mohawks, mais surtout des citoyens d’Oka venus poser des questions au maire ou simplement pour l'écouter.

Au cœur du litige : une entente récente entre le conseil de bande de Kanesatake et un promoteur concernant le transfert de terres contestées aux Mohawks. Le chef Serge Otsi Simon et le maire Quevillon, à couteaux tirés, communiquent depuis quelques mois par voie de mises en demeure.

HISTORIQUE 1 : 1990

La crise d’Oka, aussi appelée la résistance mohawk, est un affrontement de 78 jours (du 11 juillet au 26 septembre 1990) opposant des manifestants mohawks au service de police provinciale du Québec et à l’armée canadienne. Au cœur de la crise : l’agrandissement proposé d’un terrain de golf et un projet immobilier sur des terres en litige où se trouve un cimetière mohawk. Les tensions sont restées fortes tout au long de la crise, surtout après la mort du caporal Marcel Lemay, agent de la Sûreté du Québec. Éventuellement, les Forces canadiennes sont appelées en renfort et la situation prend fin. Bien que le gouvernement fédéral ait mis fin au projet d’agrandissement du terrain de golf et ait acheté les terres en litige, il ne les a toujours pas transférées à la communauté de Kanesatake.

HISTORIQUE 2 : 1914 - 1918

Près de 4000 membres du Corps expéditionnaire canadien étaient d’ascendance autochtone, nombre impressionnant, compte tenu du peu de droits civils dont jouissaient les Premiers Peuples du Canada au début du XXe siècle.

Les soldats autochtones étaient confrontés à une double barrière culturelle dans l’armée : les préjugés raciaux du monde non-autochtone et la hiérarchie militaire qui fonctionnait presque exclusivement en anglais, langue que beaucoup de recrues autochtones ne parlaient pas. Les documents et les mémoires semblent indiquer que la plupart des unités finirent par accueillir des soldats autochtones et même leur offrirent un environnement plus accueillant et plus progressiste que d’autres secteurs de la société contemporaine.

HISTORIQUE 3 : 1701


À la fin du XVIIe siècle, les Iroquois sont de plus en plus affaiblis, les Français n'ayant cessé de les attaquer sur leur propre territoire. Avec le traité de Ryswick de 1697 qui met un terme aux affrontements entre Anglais et Français, les Iroquois se retrouvent seuls à faire la guerre à ces derniers et à leurs alliés amérindiens. Lorsque Louis Hector de Callière envoie une députation en Iroquoisie pour leur proposer une paix à l'été 1700, ils prennent cette proposition très au sérieux.

En juillet 1701, quatre des cinq nations iroquoises et les alliés amérindiens des Français, venant principalement de la région des Grands Lacs, se rendent à Montréal pour discuter d'une paix. Le traité est signé le 4 août 1701 après deux semaines de pourparlers. Plus d'une trentaine de nations apposent leurs signatures. En appuyant ce traité, elles renoncent à se faire la guerre et se considèrent comme des alliés. Elles reconnaissent le gouverneur de la Nouvelle-France comme médiateur dans l'éventualité où un conflit les opposerait de nouveau. La Ligue iroquoise s'engage, quant à elle, à rester neutre dans l'éventualité d'une guerre opposant les Anglais aux Français. L'accord de paix de Montréal assure à la France la supériorité dans les questions autochtones et la liberté d'étendre sa présence militaire sur le continent au cours du demi-siècle qui suit. Le commerce et les expéditions de découverte peuvent reprendre en toute quiétude.

A VOUS DE JOUER

vendredi 12 juillet 2019

SORTIS (de force) DE L'AUBERGE

(Édition 13.07.19)

ACTUALITÉ

Agence France-Presse 12.07.19

(Washington) « Ils sont venus illégalement, nous les renvoyons légalement. C’est très simple » : Donald Trump a confirmé vendredi qu’une vaste opération d’expulsion de migrants sans-papiers allait débuter ce week-end.

HISTORIQUE 1 : les Juifs de France

Joseph Ha-Cohen insiste dans La Vallée des pleurs (1575) sur le bénéfice que la collectivité en général tira de la spoliation des juifs : « En l’année 4946 — c’est-à-dire en 1182 — le roi Philippe Auguste fit saisir les juifs dans toutes les provinces de son royaume, ravit leur argent et leur or et les chassa de son pays.

Beaucoup abjurèrent leur foi et retrouvèrent par là leur fortune et leurs biens, se mêlèrent aux chrétiens et vécurent comme eux. Les synagogues, Philippe en fit des églises pour son Dieu ; et avec ce qu’il avait pris il éleva de nombreux édifices, le palais de l’hôtel de ville, le mur de la forêt de. Vincennes près de Paris et les Champeaux où se tient le marché de Paris. Les Juifs de France étaient alors deux fois plus nombreux que ceux qui sortirent d’Egypte. Ils émigrèrent par sept chemins de ce pays devenu cruel pour eux et Israël devint extrêmement malheureux. »

HISTORIQUE 2 : les Maurisques
Yabiladi.com 29.03.19

Population musulmane ayant choisi, après la chute d’Al-Andalus en 1492, de rester en Espagne, les Morisques du pays ibérique étaient installés dans plusieurs régions, comme Grenade ou encore Valence. Mais en 1609, ils sont contraints d’abandonner leurs terres et de quitter l’Espagne suite à un décret promulgué par le roi Philippe III.

Ces expulsions avaient touché entre 120 000 et 130 000 personnes sur une population d'environ 400 000. Des milliers de Morisques avaient été tués dans des affrontements précédant le refoulement, d’autres assassinés près des ports alors que leurs enfants avaient été enlevés. Certains devaient aussi se convertir au christianisme pour rester en Espagne.

Conséquence de l’accomplissement de la Reconquista, l’exode morisque n’était pas seulement à destination du Maroc qui avait accueilli à bras ouverts des milliers d’hommes, dont ceux qui fonderont la République de Salé. Certains Morisques avaient préféré s’établir en France. Mais deux ans après les édits d’expulsions de Philippe III, la France procèdera elle aussi, à l’expulsion de Morisques venus s’installer sur ses terres.

HISTORIQUE 3: les Acadiens

En 1753, avec l’arrivée de Charles Lawrence comme lieutenant-gouverneur, l’attitude des Anglais envers les Acadiens se durcit. Leur présence est perçue comme une menace et un frein à l’établissement d’une colonie britannique. En 1754, la reprise de la guerre contre les Français en Amérique incite Lawrence à mettre son plan à exécution : déloger les Acadiens pour céder leurs terres à des sujets britanniques. À cette époque, l’expulsion d’une communauté au lendemain d’une conquête n’est pas une mesure exceptionnelle. Ce qui caractérise cette déportation est le fait qu’elle a lieu plus de 40 ans après la conquête de l’Acadie par la Grande-Bretagne et que les Acadiens sont des sujets britanniques depuis 1713.

L’ancienne colonie française subit son coup de grâce en 1755 avec la déportation systématique de la population acadienne. Les soldats traquent et capturent des milliers de personnes, puis procèdent à l’embarquement des prisonniers à partir du 10 septembre en direction de la Nouvelle-Angleterre. Chassées de leurs habitations et dépossédées de leurs terres, leurs biens saisis ou détruits, les familles sont entassées sur des bateaux, dépouillées de tout sauf de quelques effets personnels. Dans l’empressement et la confusion, plusieurs familles sont séparées. Mais ce ne sont pas tant les opérations militaires que les voyages sur les navires qui sont la cause d’un grand nombre de décès. Les naufrages ainsi que la malnutrition, l’entassement et la maladie, notamment une épidémie de petite vérole, font de nombreuses victimes. La situation des survivants dans les colonies demeure précaire. La plupart sont à la charge de l’État et ils ne reçoivent pas un accueil favorable de la part d’une population majoritairement anticatholique.

A VOUS DE JOUER