(Edition 04.04.20)
ACTUALITÉ
Peste
porcine : l'autre pandémie en cours.
Là
aussi, on applique des mesures de quarantaine inédites, on subit d'énormes
dégâts socio-économiques et on fait la course au vaccin. Il ne s’agit pas de la
pandémie de Covid-19, mais d’une autre terrible épidémie mondiale qui touche
actuellement… les cochons.
D’accord,
il est inoffensif pour les humains. Mais le virus de la la peste porcine
africaine qui circule actuellement menacerait de tuer, selon certaines
estimations, un quart des porcs dans le monde. Le pathogène se transmet via les
sangliers qui côtoient parfois certains élevages, les tiques, la viande ou bien
encore les équipements d’élevage et outils vétérinaires.
Apparue
en 2007 en Géorgie, cette souche ultra virulente, dont le taux de mortalité
approche les 100 %, a vu sa propagation s’accélérer ces dernières années au gré
des échanges commerciaux. Débarquée en août 2018 en Chine, elle aurait déjà
emporté la moitié des effectifs –que ce soit par la maladie elle-même ou
abattage massif pour éviter la propagation. En Asie, spécialement au Vietnam,
c’est même tout le système d’élevage familial qui s’en trouve bouleversé.
HISTORIQUE 1: Grippe porcine ou aviaire
La
grippe aviaire est apparue en 1997 avec une éclosion à Hong Kong. Après que de
la volaille locale ait contracté le virus H5N1, la maladie s’est propagée aux
humains et a tué 60 % des animaux infectés.
Ce
virus affecte plus communément la volaille, mais elle peut s’attaquer à toutes
les espèces d’oiseaux. Des pigeons ont été infectés et ont propagé la maladie à
travers le monde en Europe, en Afrique et à d’autres parties d’Asie.
D’autres
souches de la grippe aviaire ont été rapportées et de nouvelles éclosions
apparaissent aux quelques années. La grippe porcine représente moins un risque
de pandémie que la grippe aviaire, mais elle a quand même créé de la panique en
2009.
La
majorité des virus de la grippe infectant les cochons sont incapables de survivre
chez les humains. Cette version du H1N1 a toutefois été transmise à un garçon
de 10 ans en Californie. Après cette première infection, le virus est sorti de
l’état pour se propager pendant plus d’un an à travers l’Amérique du Nord.
Le
CDC n’avait aucune expérience avec ce type de virus grippal. La souche montrait
que la maladie provenait des cochons même si les personnes infectées n’avaient
eu aucun contact avec ces animaux.
L’Organisme
mondial de la Santé déclara en juin la grippe porcine une pandémie mondiale.
Celle-ci prit fin l’année suivante. Cette souche étrange du virus fait
maintenant apparition quelque part dans le monde à chaque saison grippale..
Les
animaux ne causent pas toutes les pandémies mondiales. En fait, certains
animaux peuvent même contribuer à prévenir la propagation de la maladie en
avertissant les habitants locaux. Des singes hurleurs de la forêt tropicale
brésilienne agissent comme une alarme qui devient silencieuse lorsque la fièvre
jaune fait apparition dans la région.
HISTORIQUE 2: La peste bubonique
Au
XIVe siècle, la peste noire a tué 25 millions d'hommes en Europe, près du tiers
de la population. Mais la maladie n'a pas disparu avec le Moyen Age. Au début
du XXe siècle, elle a tué des dizaines de millions d'hommes, y compris en
Europe. Et elle tue encore aujourd'hui. Aux Etats-Unis, ses dernières victimes
datent de 1996 et, depuis cinq à dix ans, il y a recrudescence de l'infection
en Afrique, en Asie et en Amérique.
Voilà
pourquoi l'article publié par Matt Keeling et Chris Gilligan dans la revue
Nature (19 octobre 2000) est particulièrement intéressant. Ces chercheurs de
Cambridge (Grande-Bretagne) ont mis au point un modèle mathématique qui
explique les épidémies du passé et permet de prévoir celles de demain. Leur
modèle s'appuie sur ce qui se passe dans les populations de rats. La forme la
plus fréquente de la maladie (la peste bubonique) est en effet transmise à
l'homme par la morsure de puces qui ont d'abord piqué des rongeurs infectés et
transportent donc la bactérie Yersinia pestis. La peste est essentiellement une
maladie des rats (des rongeurs en général, et parfois des chats). Elle ne passe
chez l'homme que dans certaines circonstances: essentiellement quand les puces
n'ont plus assez de rats à piquer.
Deux
scénarios. Imaginez les égouts et les caves d'une grande ville, et les millions
de rats qui habitent cette cité souterraine. Premier scénario: la proportion de
rats susceptibles d'attraper la maladie (parce que non immunisés par une
épidémie précédente) est élevée: plus de 80 %. Si le bacille de la peste entre
dans cette population de rats, apporté par exemple par un rongeur sauvage, la
maladie va se répandre comme une traînée de poudre, les puces portant le
bacille vont se multiplier, la majorité des rats infectés va mourir et, en
quelques semaines, les puces vont sauter sur les hommes et leur apporter la
peste.
Deuxième
scénario: la proportion de rats vulnérables
est
faible (de 25 à 50 %). La maladie ne touchera que ces rats-là et ne passera pas
chez l'homme. «A Bombay par exemple, explique Matt Keeling, il semble que 70 %
des rats soient résistants à la peste.»
HISTORIQUE 3: Crise de la vache folle
La
crise de la vache folle est une crise sanitaire, puis socio-économique
caractérisée par l'effondrement de la consommation de viande bovine dans les
années 1990 quand les consommateurs se sont inquiétés de la transmission de
l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) à l'homme via l'ingestion de ce type
de viande.
Cette
maladie est une infection dégénérative du système nerveux central des bovins.
C'est une maladie mortelle, analogue à la tremblante des ovins et des caprins,
causée par un prion. Une épizootie importante a touché le Royaume-Uni, et dans
une moindre mesure quelques autres pays, entre 1986 et les années 2000,
infectant plus de 190 000 animaux, sans compter ceux qui n'auraient pas été
diagnostiqués.
Cette
épidémie trouverait son origine dans l'utilisation pour l'alimentation des
bovins de farines animales, obtenues à partir de parties non consommées des
carcasses bovines et de cadavres d'animaux. L'épidémie a pris une tournure
particulière quand les scientifiques se sont aperçus en 1996 de la possibilité
de transmission de la maladie à l'homme par le biais de la consommation de
produits carnés.
La
maladie a fait, au 24 janvier 2017, 223 victimes humaines dans le monde — dont
177 au Royaume-Uni et 27 en France —1, touchées par des symptômes proches de la
maladie de Creutzfeldt-Jakob, une maladie de même nature que l'ESB.
Relayée
auprès du grand public par les médias, la crise éclate en 1996. Elle mêle à la
fois des aspects éthiques, avec la prise de conscience des consommateurs de
certaines pratiques courantes en élevage mais qu'ils ignoraient comme l'utilisation
des farines animales, et économiques du fait de la chute de consommation de
viande bovine qui en suivit et du coût des différentes mesures adoptées.
Diverses
mesures ont été prises pour enrayer l'épidémie et préserver la santé humaine,
comme l'interdiction d'utiliser les farines animales dans l'alimentation du
bétail, le retrait de la consommation des produits considérés à risque, voire
de certains animaux (animaux âgés de plus de 30 mois au Royaume-Uni), le
dépistage de la maladie en abattoir et l'abattage systématique des troupeaux où
un animal malade a été observé.
Aujourd'hui,
l'épidémie est presque complètement[pas clair] enrayée, malgré 37 cas bovins
encore diagnostiqués au Royaume-Uni en 2008.
Le
23 mars 2016 un nouveau cas de vache folle est détecté en France dans le
département des Ardennes. Il s'agit du troisième cas isolé d’ESB de ce type
détecté en Europe depuis 20152.
D'autres
cas humains pourraient néanmoins apparaître dans le futur car le temps
d'incubation de la maladie peut être long. La crise de la vache folle laisse
comme héritage une amélioration des pratiques dans la filière bovine, à travers
le retrait de certaines parties de la carcasse à l'abattoir lors de la découpe,
mais aussi une traçabilité renforcée des animaux. En santé publique, cette
crise a également entraîné le renforcement du concept de principe de
précaution.
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